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LE TISSAGE AVEC UN METIER
VERTICAL A PESONS
Le tissage est une activité élaborée, dont la chaîne opératoire depuis
la production des fibres jusqu’à la fabrication de l’étoffe suppose une
connaissance approfondie des matériaux et des techniques.
Le principe du métier à tisser vertical fut inventé au Néolithique, au
IVème millénaire av. J.-C., dans la région méditerranéenne ou en
Mésopotamie. Les métiers à tisser verticaux néolithiques étaient lestés
au moyen de pesons en terre cuite. La reproduction du métier à tisser
vertical, présenté sur les photos de gauche, lesté avec des pesons en
pierre est plus récente et date de l’Age du Fer, à partir de 700 ans
av. J.-C. Les métiers à tisser horizontaux ne furent introduits en
Europe qu’au Moyen Age, alors qu’ils étaient utilisés depuis le IVème
millénaire av. J.-C. en Egypte.
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Métier à tisser vertical à pesons. Illustration de T. Girard. © 2013. La Théorie Sensorielle.
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Le tissage consiste à entrecroiser des fils tendus, verticaux ou
horizontaux, appelés la chaîne, avec un fil libre et continu nommé la
trame. Chaque passage perpendiculaire du fil de trame est appelé une
duite. La trame, enroulée sur une navette, est passée entre les fils de
chaîne dont certains sont baissés et d’autres levés grâce à une ou
plusieurs barres de lisses. La lisse est une simple boucle de ficelle
attachée d’un côté à la barre de lisses et de l’autre à un fil de
chaîne. Le métier à tisser permet donc soit de lever, soit de baisser
certains fils de chaîne qui sont attachés par groupes alternés sur une
ou plusieurs barres de lisses. Plus le nombre de barres de lisses est
élevé, plus augmentent les possibilités de produire différents
entrecroisements de fils, en levant ou baissant les barres, et donc des
dessins complexes, qui sont nommés armures (toile, sergé, etc.).
La première opération avant le tissage proprement dit est l’ourdissage
de la chaîne. Elle consiste à déployer toute la longueur du fil de
chaîne et à ordonner ses fils de manière à pouvoir les disposer sur le
métier à tisser sans qu’ils ne s’emmêlent. Pour ce faire il existe de
nombreuses techniques; la plus simple est celle des piquets plantés
dans le sol, puis plus élaborée est celle de l’ourdissoir composé de
fiches en bois fixées sur un cadre ou dans un mur. Une pelote de fil
est alors dévidée en suivant à chaque passage des itinéraires alternés
entre ces fiches et en formant des allers-retours qui seront autant de
fils de chaîne. On obtient ainsi des fils séparés et bien ordonnés qui
peuvent être attachés, par la boucle formée à l’une de leurs
extrémités, à la barre d’ensouple supérieure du métier à tisser. A
l’autre bout, les fils de chaîne sont lestés par groupes à des poids
appelés pesons pouvant être soit en terre cuite, soit en pierre. Ces
pesons servent à tendre les fils de chaîne sur le métier et, afin de
maintenir l’ordre des fils de chaîne, une barre de séparation des
nappes (fils pairs et impairs) est disposée parallèlement à l’ensouple
en bas du métier à tisser. Enfin une cordelette tenant l’espacement
entre chaque fil est enlacée au-dessous cette barre et au-dessus des
pesons.
Le tissage proprement dit s’effectue du haut vers le bas dans ce genre
de métier, en tassant le fil au moyen d’un couteau en bois de bas en
haut. L’inconvénient d’un tel métier à tisser est que sa hauteur ne
permet pas d’obtenir une chaîne d’une grande longueur et par conséquent
limite la longueur des tissus. Une astuce pour minimiser ce problème
est la constitution de pelotes de réserves de fils directement
au-dessus des pesons. Une fois une certaine longueur de tissus
fabriquée, elle est enroulée sur l’ensouple supérieure grâce à la barre
de blocage, puis les fils de chaîne sont allongés en déployant la
réserve de fils vers le bas.
Dans le monde préhistorique, le tissage apparaît avec les sociétés
d’agriculteurs du Néolithique capables de produire des surplus à des
fins d’échanges. Le tissage a une forte valeur ajoutée en raison de sa
complexité technique et de la nécessité de dégager beaucoup de temps et
de main-d’œuvre pour le réaliser (culture et transformation des fibres,
ourdissage et tissage proprement dits). Il est certain que dans de
telles sociétés, un vêtement en tissu était un signe extérieur
manifeste de richesse. Quand on songe aux vêtements représentés sur les
stèles néolithiques du Petit -Chasseur en Valais et à leur richesse de
décors, il est évident que c’était des signes ostentatoires destinés à
être vus et interprétés dans le sens d’un pouvoir centralisateur et de
la maîtrise d’un savoir-faire technique.
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Bibliographie :
E.J.W. Barber, 1992. Prehistoric
Textiles. Princeton University Press.
C. Breniquet, 2008. Le
métier à tisser à pesons. Essai sur le tissage en Mésopotamie. Des
premières communautés sédentaires au milieu du IIIe millénaire. Editions de Boccard, pp. 149-175.
Alain Gallay, 2006. Les sociétés
mégalithiques. Pouvoir des hommes, mémoire des morts. Collection
Le savoir suisse, Histoire.
Fabienne Médard, 2010. L’art du
tissage au Néolithique. IV-IIIème millénaire avant J.-C. en Suisse.
CRA 30, Monographies. CNRS Editions.
Lien :
Aux origines du métier à tisser vertical
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